lundi 22 octobre 2007

Origine caroligienne

Les Carolingiens doivent leur nom à leur ancêtre direct, Charles Martel, maire du Palais D'Austrasie, dont la victoire à Poitiers interrompt la progession des Arabes vers le Nord et lui donne une immense renommée dans l'Occident catholique. C'est à tort que l'on se réfère au nom de Charlemagne pour désigner la dynastie. La dynastie des Carolingiens trouve ses origines au sein de la famille des Pippinides, qui détint, pendant plusieurs générations, la charge de « maire du palais » sous le règne des souverains mérovingiens d'Austrasie. Au fur et à mesure de la désagrégation du pouvoir de la dynastie mérovingienne, durant la période dite des « rois fainéants », les maires du palais pépinides accrurent leur pouvoir : déjà Pépin de Herstal, puis Charles Martel dirigeaient de façon quasi autonome la politique du royaume, tels des suzerains, mais sans le titre ; ainsi, ils nommaient les ducs et les comtes, négociaient les accords avec les pays voisins, dirigeaient l'armée, étendaient le territoire du royaume (notamment en Frise) et allaient même jusqu'à choisir le roi mérovingien.
Le territoire particulièrement prisé par les Pippinides, fut le territoire favori des Carolingiens : région de Liège (Herstal et Jupille), Aix-la-Chapelle et Cologne.

Le règne de Pépin le Bref, premier roi carolingien

C'est Pépin le Bref qui met fin à la dynastie mérovingienne en 751 : las de devoir dépendre de rois inutiles et encombrants, Pépin — après avoir obtenu l'aval du pape Zacharie — fait enfermer son suzerain Childéric III, et se proclame à sa place à la tête du royaume. La fin de la royauté mérovingienne est marquée, selon la tradition franque des « rois chevelus », par la tonsure qui est imposée à Childéric. Pépin devient ainsi le premier roi des Francs carolingien, d'abord selon les traditions de son peuple et ensuite, pour l'Église catholique.

Charlemagne et l'empire carolingien

Charlemagne, fils de Pépin le Bref, est sans aucun doute le souverain qui marque le plus l'époque carolingienne, par la longévité de son règne, mais aussi grâce à son charisme, à ses conquêtes militaires (il parvient à étendre le royaume des Francs à toute la Gaule hormis la Bretagne, à la majeure partie de la Germanie, de l'Italie et de l'Espagne) et à ses réformes (dans les domaines de l'éducation, de l'économie et avec un début de restauration de l'État, etc.)
Charlemagne découpe son empire en pagi ou comtés ; dans les zones moins « pacifiées », il crée des duchés (à caractère militaire) et fait garder les zones-frontières (ou « marches ») par des hommes de confiance, qui deviendront plus tard les marquis, ou margraves.
Le comté est la plus importante de ces circonscriptions : à sa tête, Charlemagne place un fonctionnaire royal, généralement choisi parmi les puissantes familles de propriétaires terriens francs ; ce fonctionnaire exerce le pouvoir militaire et judiciaire (la potestas) en principe par délégation et il lève les taxes pour le compte de son souverain. Il est assisté dans sa tâche par des vicomtes et des viguiers. Il est aussi en principe révocable par l'empereur.
En parallèle et pour contrebalancer le pouvoir de l'aristocratie, Charlemagne s'appuie sur l'Église, qu'il réorganise en privilégiant l'autorité des évêques métropolitains (les archevêques) ; en ce qui concerne le monachisme, il dote les principales abbayes de terres à mettre en valeur et il en place les abbés sous son autorité directe.
Une autre mesure va dans le même sens : à des hommes de confiance laïcs, qui sont ses envoyés, il adjoint en général un clerc à travers une nouvelle institution : les missi dominici (littéralement, les « envoyés du maître »). Ces envoyés sont chargés de régler les conflits entre les Grands et de relayer les ordres du roi auprès des détenteurs de charges, mais aussi de recueillir le serment de fidélité de ses sujets (ce qu'ils font à deux reprises durant le règne de Charlemagne). On ignore la portée réelle de leur action, mais celle-ci semble indiquer que, déjà à cette période, le roi a du mal à faire respecter son pouvoir.
Sous l'influence des nombreux chrétiens lettrés de son entourage, le roi est aussi législateur : s'il faisait déjà appliquer la loi à travers le ban germanique, il renoue avec la conception romaine du droit et renouvelle l'importance des actes écrits dans le royaume. Après les assemblées qui réunissent les Grands du royaume (les « plaids »), des ordonnances, découpées en chapitres (d'où leur nom de capitulaires) sont émises par la chancellerie du Palais : elles sont une source précieuse pour l'étude de la période.
À un autre niveau, plus idéologique que politique, c'est aussi aux lettrés chrétiens que l'on doit la naissance d'une nouvelle idée de l'État. Celle-ci se veut au départ une restauration de l'empire romain, pourtant elle repose sur des fondements très différents en légitimant la royauté : profondément chrétienne, elle fait du roi des Francs un nouveau David. L'idée de l'unité du royaume semble un temps l'emporter avec la renaissance de l'Empire d'occident, à la noël 800.
Du point de vue culturel, l'époque de Charlemagne, de son fils Louis le Pieux et de ses petits-fils est connue sous le nom de « Renaissance carolingienne ». L'enseignement classique — en particulier celui du latin — est remis à l'honneur, après avoir été dénaturé et délaissé à la fin du règne des Mérovingiens. Cependant, la langue latine est désormais quasi-exclusivement la langue du clergé, les milieux militaires lui préférant le francique : cette évolution inéluctable va faire du latin une langue morte et donner naissance aux ancêtres des langues nationales que sont le français et l'allemand : le roman et le tudesque.
Les troubles sous Louis le Pieux

Le partage de l'empire

Après la mort du fils de Charlemagne, Louis Ier le Pieux, le traité de Verdun (843) fixe les modalités du partage de l'empire entre ses fils ; le territoire est divisé d'est en ouest en trois royaumes :
Lothaire Ier hérite du titre impérial et de la partie centrale du royaume (l'Italie, la Provence et la Lotharingie, qui regroupe les terres situées entre l'Escaut et le Rhin) ; son domaine comprend les capitales politique (Aix-la-Chapelle) et religieuse (Rome) de l'empire. Cependant, le titre impérial se vide de son importance : après le partage de Verdun, Lothaire conserve la dignité impériale, mais dans les faits celle-ci n’est plus qu’une convention qui ne correspond plus à aucun pouvoir qui soit supérieur à celui des autres rois. Plusieurs fois au cours du Xe siècle, le titre est même vacant. Il faut ensuite attendre 962 pour que le titre d’empereur renaisse en Occident : Otton Le Grand, de la dynastie saxonne en Germanie, est couronné par le pape Jean XII à Rome.
Louis le Germanique reçoit la bande orientale (la « Francie orientale », qui fera partie du futur Saint Empire romain germanique) : il y fonde une dynastie qui dirigera l'équivalent de l'Allemagne actuelle jusqu'en 911 ;
Charles II (dit « Charles le Chauve ») obtient quant à lui le tiers occidental de l'empire (« Francie occidentale »), à l'ouest de l'Escaut, la Meuse, la Saône et le Rhône, où perdurera la dynastie carolingienne jusqu'à l'avènement des Capétiens en 987.

L'affaiblissement de la dynastie carolingienne

Disparition de la Lotharingie

Lothaire est le premier des trois frères à décéder, laissant l'empire à la merci des deux autres. Finalement, après maintes péripéties, la Lotharingie est rattachée en 925 à la Francie Orientale, l'Escaut marquant la frontière entre les Francies occidentale et orientale. Et le roi de Francie orientale récupère, par la même occasion, le titre d'empereur

Invasions scandinaves
La première attaque des Vikings touche en 793 les côtes britanniques ; puis la pression des Vikings s’accentue : ils remontent les fleuves à bord de leurs navires à fond plat, improprement nommés « drakkars », et pillent les trésors des abbayes avant de s’en retourner en Scandinavie ; toutefois, certains de leurs établissements côtiers ont un caractère durable. En 841, ils attaquent l’abbaye de Jumièges et la ville de Rouen ; les moines doivent s’enfuir devant les dangers de razzias, emportant avec eux les reliques de leur saint. A la fin du IXe siècle, de véritables armées vikings portent les dévastations jusqu’au cœur du royaume occidental.
Les rois carolingiens semblent impuissants : Charles Le Chauve essaie bien de construire des fortifications supplémentaires. Il demande à des chefs de l’aristocratie de défendre les régions menacées. Robert le Fort est placé par le roi à la tête d’une marche occidentale ; il meurt en combattant les Vikings en 866. Le comte Eudes défend Paris contre une attaque venue de la Seine en 885. Ces Grands acquièrent un prestige immense dans la lutte contre l’envahisseur scandinave, prestige qui participe à l'affaiblissement du pouvoir royal. Les succès militaires sont désormais attribués aux marquis et aux comtes.
L’incapacité des Carolingiens à résoudre le problème scandinave est manifeste : en 911, par le traité de Saint-Clair-sur-Epte, le roi carolingien Charles le Simple cède la Basse-Seine au chef viking Rollon. Il s’en remet à lui pour défendre l’estuaire et le fleuve, en aval de Paris. Cette décision est à l’origine de la création du duché de Normandie. Les Carolingiens sont contraints de céder des territoires et livrer des tributs pour contrer le danger scandinave. Ils sont en outre absorbés par les querelles familiales.
Le climat d’insécurité a donc accéléré la décomposition du pouvoir carolingien.

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